La préparation de la grève générale du 21 octobre chez Fiat en Italie
Mis à la porte de la CGIL et de la FIOM en Italie, Sergio Bellavita est un ancien secrétaire national de la FIOM en Italie. Avec d'autres camarades de la CGIL ils ont décidé de mettre leur longue expérience au service du syndicat indépendant USB, Unions sindicale di base.
Dans un entretien à Sinsitra Anticapitalista et traduit par le site "A l'encontre", il décrit la situation chez Fiat et les enjeux avant la grève générale en Italie du 21 octobre et le "No Renzi day" du 22 octobre.
Lire l'article complet sur le site A l'encontre
Quelques extraits :
Le modèle autoritaire et esclavagiste de Marchionne, imposé aux salariés de FCA, passe désormais inaperçu. Cela s’était passé exactement de la même manière il y a quelques années avec les protestations autour du salaire qui, de plus en plus souvent, n’arrive plus à couvrir la quatrième semaine du mois. Dans les deux cas, il a suffi que les médias se détournent du problème, pour que celui-ci semble ne plus exister. Or les conditions de travail à FCA ne se sont nullement améliorées.
Pire encore, elles sont désormais tributaires du « modèle » inauguré à Pomigliano11. Le modèle spécifique à Pomigliano dans la banlieue de Naples est devenu la norme de tous les établissements du groupe. Mais aussi parce qu’avec les accords entre confédérations syndicales de 2011 et 2013 et, surtout avec le Texte unique du 10 janvier 201412, ce modèle est devenu la norme pour l’ensemble du monde du travail italien.
Marchionne a ainsi joué le rôle d’avant-garde et son attaque est devenue globale. Il faut bien comprendre que nous traitons ici d’un accord qui ne reconnaît l’intégralité des droits syndicaux qu’aux organisations qui signent des contrats nationaux et d’entreprise qu’elles imposent à tous les échelons sans contestation possible. C’est une vraie défaite, dramatique pour toutes les oppositions syndicales. Trop souvent, et à tort, ceux qui ne contestent pas à cette nouvelle réalité le font parce qu’ils ont décidé de rentrer dans le rang. La CGIL, la CISL et l’UIL, bien qu’encore divisées au niveau de leur pratique à FIAT Chrysler, ont embrassé ce même modèle syndical et social sur le plan national.
Malgré tout, la résistance à ce modèle existe, même si les médias n’en ont cure. Une partie du monde FCA résiste. En témoigne l’entrée dans le syndicat USB des délégués et des déléguées «incompatibles» provenant de la FIOM/CGIL, ce qui a transformé notre organisation syndicale en une représentation solide et la plus représentative du syndicalisme de base dans le groupe FIAT Chrysler. Nous nous opposons aux aux heures supplémentaires obligatoires par la grève, cette dernière étant à la fois interdite par les accords confédéraux et réprimée au sein même du syndicat FIOM. A la FCA de Melfi, nous avons appelé à la grève de tous les dimanches de travail pour toute l’année 2016. Nous défendons ainsi la liberté pour chaque salarié de choisir s’il veut travailler ou non le dimanche. A Termoli, nous avons obtenu une victoire importante avec la condamnation de FCA pour antisyndicalisme, l’entreprise n’ayant pas retenu les contributions syndicales sur les salaires. Dans l’entreprise Sevel14, nous menons une dure bataille légale contre les intimidations que subissent les salariés. C’est un travail de construction syndicale d’envergure, dont l’objectif est de faire éclater un conflit général sur les conditions de travail à FCA.
La FIOM a engagé des grandes manœuvres afin de réintégrer l’accord Marchionne ce que démontrent les louanges de Landini (secrétaire général de la FIOM) à Marchionne et la condamnation, pour «incompatibilité», des représentants syndicaux qui ont appelé à la grève contre le travail du samedi. La seule résistance provient aujourd’hui des syndicats indépendants de base. Dans ce contexte, la victoire des cinq licenciés de Nola, ouvriers licnéciés dont la réintégration a été ordonnée par la cour d'appel de Naples en septembre 2016, est de la plus grande importance. Elle nous montre que Marchionne peut perdre même si, pour l’heure, il n’a perdu que devant une cour de justice. Mais il y a de nombreux signes encourageants, contredisant l’affirmation que le monde du travail serait entièrement résigné.
Les 21 et 22 octobre sont donc deux échéances uniques et nécessaires pour ceux qui, tout en défendant leurs revendications spécifiques, veulent construire l’opposition aux politiques de Renzi et de la Confindustria22, ainsi qu’aux diktats de l’Union européenne. Ce n’est pas un hasard si l’ensemble des forces qui mobilisent pour la manifestation nationale du 22 octobre à Rome est si large et si variée. Le problème est, comme toujours, de faire en sorte que ce patrimoine de luttes et d’expériences de résistance ne se perde pas dans les mille ruisselets de la fragmentation sociale et politique. C’est là un pari que nous ne devons pas perdre.
(Article publié le 12 octobre 2016 sur le site Internet de Sinistra Anticapitalista; traduction Dario Lopreno)