SUD Renault : on sait ce qu'Ampere
On sait ce qu'Ampere... - SUD Renault Guyancourt/Aubevoye
Le 8 novembre, Luca De Meo a annoncé le démantèlement de Renault. En séparant l'électrique du thermique, le patron de Renault veut faire comme Tesla. Mais Elon Musk est-il un modèle à suivre...
Bien plus qu'une nouvelle réorganisation, c’est le démantèlement de Renault que Luca De Meo a annoncé dans sa conférence de presse du 8 novembre. Le contrat de travail de 2406 salariés Renault de notre établissement sera transféré dans Ampere grâce à l’article L1224-1 déjà utilisé en 2021 dans la Maintenance de l’Ingénierie. Chaque entité devra renégocier ses accords collectifs... à la baisse, comme son budget CSE.
Cette « révolution » va recréer de la complexité, des silos voire des doublons, et mettre en concurrence les équipes du Technocentre et d’Aubevoye scindées en plusieurs entités juridiques. Comment dans chaque entité arbitrer ensuite les priorités, quel fournisseur choisir : à l’intérieur ou à l’extérieur du groupe... ?
L’ombre chinoise
Ce sera finalement 50/50 avec le chinois Geely. Le transfert des activités thermiques/hybrides dans Horse doit être bouclé en 2026. Mais la composition du capital de Horse risque d’évoluer, car Renault ne veut être qu’un actionnaire minoritaire.
Après ses déboires en Russie, la direction de Renault prend un gros risque avec Geely vu la concurrence et les tensions internationales avec la Chine. A Stellantis, Tavares veut quitter la Chine. Renault aurait-il plus d’expertise en géopolitique ?
Le grand absent, c’est Nissan qui monnaye sa participation dans Ampere en échange du passage de 43% à 15% de Renault dans Nissan. Sympa l’ambiance dans l’Alliance !
Après les voitures à vivre, les voitures à cash
Mais l’important pour De Meo, c’est la finance. Au Capital Market Day, il a promis aux « investisseurs » :
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Plus de 5% de Marge Opérationnelle (MOP) en 2022 au lieu des 2% prévus,
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Une MOP de 8% en 2025 et de 10% en 2030,
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35% des bénéfices reversés en dividendes.
Il s’agit de se débarrasser des secteurs dits moins rentables (thermiques) pour se concentrer sur les plus rentables (VE, datas, nouvelles mobilités…). En attendant, ce sont les « vieux » véhicules thermiques qui font vivre Renault.
Pour motiver les salariés, De Meo veut augmenter leur part dans le capital. Bref, nous payer en actions au détriment des salaires, comme lors des NAO 2022 où il nous a été promis 6 actions gratuites chèrement payées par les salariés (voir plus loin), quand De Meo en perçoit 75 000 par an.
L’Ampère est pavé de bonnes intentions
Après le rêve avorté du véhicule autonome, il s’agit de vendre un nouveau rêve, celui du « véhicule défini par logiciel » (Software Defined Véhicule, SDV), un ordinateur hyperconnecté sur 4 roues… Y’a plus qu’à !
Certes, le véhicule électrique est censé s’imposer à Renault. Ça ne justifie pas un démantèlement. Mais déjà le ministre des Transports évoque une clause de revoyure en 2026 sur l’interdiction de la vente de voitures thermiques en 2035. Clément Beaune exhorte aussi à « ne pas arrêter d’exporter des véhicules hybrides ou thermiques à l’étranger en 2035, sinon ce sont les Chinois qui vont conquérir les marchés en développe-ment ». C’est la fin du thermique, vraiment ?
L’Ingénierie part à vau-l’eau entre les DA, les RCC et les démissions. Les connaissances fichent le camp ainsi que les jeunes embauchés. Avec la course à la MOP, ceux qui restent voient leurs conditions de travail se dégrader, au point qu’en CSE la médecine du travail alerte sur une hausse des épuisements professionnels et de la surcharge de travail, et que la direction annonce qu’il n’y aura pas de CAR23.
D’autres choix sont possibles
Renault n’a pas su choisir une politique Produit compatible avec son savoir-faire des « voitures à vivre ».
Décarboner, c’est aussi diminuer le volume et la masse des véhicules, à l’inverse des gros SUV et de la montée en gamme choisis pour leurs marges plus élevées. C’est simplifier les technologies, déconnecter ou alléger électroniquement certains modèles. Cela permettrait de mieux réussir la transformation écologique.
Mais la direction de Renault a choisi de faire comme tout le monde et d’accélérer sans s’assurer d’une bonne répartition des compétences au bon niveau et au bon moment.
Il s’agissait de faire des économies de masse salariale à court terme car les salariés sont des « coûts fixes » toujours trop élevés pour nos chers dirigeants. Mais ce sont eux qui font les choix stratégiques et font régulièrement fausse route.
En plus de la vague de départs, c’est la gestion de la transformation des compétences qui laisse pantois.
Les salariés Renault qui ont développé l’E-Tech ou le HR12 voient leurs activités partir chez Horse. Ceux de « Power » voient leurs activités partir en Roumanie ou en Inde. Et les moyens mis en place pour les reconvertir sont loin des engagements de nos dirigeants.
Il faut que ça change : mieux former et reconvertir, stopper les délocalisations, la baisse des effectifs et des compétences, augmenter les salaires… L’heure est à la résistance !