A Louviers, l'usine Recitel en grève les 10 - 11 et 12 avril

Publié le par Correspondant NPA Louviers 12 avril 2013

« Les filles, elles bossent comme des folles sur leurs lignes, les tapis sont trop bas, elles sont cassées de partout, et elles se font à peine 1100€ avec l’ancienneté. Vous trouvez ça normal vous ? »

Les trois cadres qui sont sortis ce jeudi soir pour tenter de renouer le dialogue avec la trentaine de grévistes regroupés autour d’un maigre feu de palettes et d’un…parasol font profil bas. L’un d’eux tente de convaincre : « Si vous ne laissez pas passer le camion qui doit partir à 21h pour Poissy, notre société est morte, PSA nous rayera de la carte ». Les réactions fusent : « Il fallait y penser avant ! Pourquoi tu as relevé les noms ce matin avec l’huissier en regardant chacun bien dans les yeux pour essayer de nous intimider ? Vos méthodes il y en a marre ! ». Un autre : « Nous racontez pas de salades, on nous fait bourrer comme des malades pour 1290€ avec la prime d’équipe,  et je suis obligé d’aller au Resto du cœur ! ». Le cadre encaisse, blanc comme un linge, et répond seulement : « Mais ce n’est plus nous qui avons la main, si vous continuez, les Belges vont fermer… ». Un délégué  rétorque : « L’enveloppe  pour les NAO était de 250 000€, on n’a rien demandé de plus, sauf qu’on ne voulait pas de vos augmentations à la tête du client. Et on a été traités comme des moins que rien. Alors, le blocage, il nous fait aussi peur qu’à vous, mais nous on ne l’a pas voulu ! »

Moments pris sur le vif à 17h à l’usine de Louviers (180 salarié-e-s, dont 130 en production). Deux délégués, Hakim et Gérard*, ont appelé le NPA pour avoir un coup de main. Les trois autres  usines du groupe en France sont aussi  bloquées depuis mercredi matin, plus aucun camion ne passe. Conséquence la plus sensible, le fabriquant  de mousse de polyuréthane ne peut plus fournir d’éléments d’isolation et de confort aux usines de  l'automobile…

A Louviers, il n’y a que FO, et ce mouvement constitue une première, mais ailleurs c’est différent et l’intersyndicale CGT, FO, CFDT  fonctionne bien. C’est à Langeac en Haute-Loire que les traditions de lutte sont les plus ancrées avec une implantation CGT (les autres sites sont Trilport en Seine-et Marne et Noyen dans la Sarthe, le siège étant à Gennevilliers).

 

A force de tirer sur l’élastique…

Pour les négociations salariales annuelles (NAO), la direction est arrivée avec une enveloppe de 250 000€ : 1,3% d’augmentation générale, 0,5% en individuelles.  Les syndicats voulaient 2,1 pour tout le monde, et 0,5% seulement en individuel, pour favoriser les plus petits salaires et éviter que ce soient toujours les mêmes qui bénéficient des augmentations à la tête du client. Ras le bol, et blocage, manifestement inattendu par ceux qui ne savent que tirer sur l’élastique.

Devant l’enjeu pour Peugeot, la direction acceptait en soirée de discuter sur 1,9% et 0,5%, à condition que la barrière soit levée. A Langeac, à Louviers, les grévistes ont accepté, ce qui a été confirmé par l’équipe du matin à 5h. Mais le hic, c’est qu’une fois trois délégués partis rejoindre les autres pour une réunion de discussion centrale à Gennevilliers à 8h, la cinquantaine de grévistes au piquet assiste, la rage au ventre au ballet des camions et des taxis. Et les délégués qui ne répondent pas au téléphone… On en est là à 9h30.

A 11h, le climat a changé : si la délégation n’a pas pu répondre, c’est qu’ils étaient en pleine négociation. L’aller-retour est rétabli, et ça a bougé : le positif, c’est 2% pour les ouvriers et employés, et plus question d’augmentation individuelle. Le négatif, c’est le refus de payer une quelconque partie des 3 jours de grève ; la moitié pourrait être pris sur les compteurs temps, le reste perdu. Ca, ça ne passe pas du tout. Le vote est clair, et la délégation reçoit mandat de demander le paiement. Mais la direction est intraitable. L’accord va se faire, avec des sentiments mêlés, sur l’étalement des 3 jours perdus sur 5 mois, à condition que le travail reprenne à 13h. Tout le monde sait bien que la grève n’aurait pas passé le week-end, et ce qui domine, c’est le sentiment que pour une première, on les a empêché de diviser : ils ont dû caner, les 2% c’est pour tout le monde.

La grève se termine par un petite allocution d’un délégué qui souligne justement ces points… et remercie aussi le NPA de son soutien.

*prénoms changés

 

Lire le compte-rendu sur le site NPA 27

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