Industrie automobile européenne : le pire est à venir

Publié le par Le Monde édition du 16 juillet

Pour information, voici l'article publié par le quotidien Le Monde dans son édition du 16 juillet

 

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Les prochains mois s'annoncent difficiles pour le marché automobile européen. Au premier semestre 2010, les ventes de voitures neuves dans l'Union européenne ont affiché une très timide hausse de 0,2 %, à 7,28 millions de véhicules, par rapport au premier semestre 2009. Surtout, par rapport à la même période en 2008, les ventes chutent de plus de 10 %. Les ventes de voitures neuves dans l'Union européenne ont baissé de 6,9 % en juin sur un an, conséquence de la fin des primes à la casse et de la crise économique. Après trois mois de hausse (entre janvier et mars), la dégringolade amorcée en avril (- 7,4 %) s'était accélérée en mai (- 9,3 %).

Et le reste de l'année ne s'annonce pas meilleur. Pour soutenir les ventes, en 2009, la plupart des pays européens avaient mis en place des primes à la casse. Mais elles ont pris fin ou ont été réduites, d'où l'impact négatif sur les ventes ces trois derniers mois. A cela s'ajoutent les incertitudes qui pèsent sur l'économie. Les plans d'austérité décidés en Grande-Bretagne ou en Espagne, ainsi que la montée continue du chômage, en France par exemple, devraient avoir un impact sur le moral des ménages.

Il ne fait plus aucun doute que le marché allemand devrait être celui qui souffrira le plus en 2010. Grâce à une prime à la casse de 2500 euros, les ventes avaient explosé en 2009 à 3,8 millions de véhicules. Selon les estimations de Mathias Wisman, président de la fédération de l'industrie automobile (VDA), le marché devrait tomber à environ 2,9 millions de véhicules, soit un peu moins qu'en 2008 (3,09 millions).

Néanmoins, les constructeurs allemands trouveront sans doute une consolation dans les exportations. Avec l'explosion des ventes dans certains pays émergents, en premier lieu la Chine, elles ont explosé au mois de juin de 26 % (395 000 véhicules). Certains constructeurs n'arrivent même plus à assurer les commandes dans des temps raisonnables. BMW vient d'ailleurs d'annoncer qu'il serait obligé d'exporter plus de véhicules en Chine depuis ses usines allemandes.

Inquiétudes aussi du côté de l'Espagne. Après l'effondrement des ventes de voitures, fin 2008 début 2009, lorsque le pays était entré en récession, le gouvernement s'était résolu à introduire une prime à la casse de 2 000 euros début janvier 2010. Avec une hausse de près de 40 % au premier semestre, le pays ne doit donc son sursaut qu'à l'introduction de cette aide gouvernementale. Las, selon l'association des constructeurs automobiles, l'Anfac, les ventes de véhicules pourraient chuter de plus de 30 % au second semestre. Non seulement, la prime à la casse a pris fin le 1er juillet, mais la TVA a été relevée de deux points à cette même date.

De même, au Royaume-Uni, les inquiétudes se font jour. "Le secteur automobile s'attend à des conditions économiques difficiles au second semestre et l'action du gouvernement pour améliorer l'accès au crédit des consommateurs et des entreprises sera importante pour soutenir la dynamique de la reprise", prévient Paul Everitt, directeur général de l'association des constructeurs automobiles britanniques, la SMMT.t

En Italie, les prévisions ont carrément viré au rouge foncé pour le deuxième semestre. L'Anfia, l'association des constructeurs italiens, ne cache pas son inquiétude. Après la baisse de juin (-19,1 % à 170 625 unités), "cela donne une idée de ce qui nous attend ces prochains mois : une nouvelle contraction du marché, renforcée par la baisse traditionnelle du marché durant la période estivale", a résumé Eugenio Razelli, président de l'Anfia.

Dans ce panorama, la France fait un peu figure d'ovni. Pour continuer à soutenir les ventes, le gouvernement a décidé d'une fin de la prime à la casse progressive. "La diminution de la prime à la casse (500 euros depuis le 1er juillet) a conduit logiquement à une diminution en douceur des ventes", explique François Roudier, porte-parole du Comité des constructeurs français d'automobiles (CCFA). Si le marché va connaître lui aussi un ralentissement sur la seconde partie de l'année, il devrait néanmoins être beaucoup léger. "Les ventes d'automobiles neuves pourraient totaliser 2,060 millions d'unités cette année et non plus 2 millions de véhicules comme nous l'avions prévu initialement. Finalement, le marché français ne devrait donc perdre que quelque 100 000 véhicules", indique Bernard Cambier, directeur commercial France de Renault. "En France, il y a quand même beaucoup d'incertitudes pour les prochains mois liées au contexte économique qui reste difficile. La vraie question qui se pose, c'est pour 2011", estime de son côté Flavien Neuvy, qui dirige l'Observatoire de l'automobile.

Les constructeurs automobiles comptent désormais sur les pays émergents pour soutenir leurs ventes. Malgré le net ralentissement en Europe, le marché mondial devrait lui augmenter grâce notamment à l'Inde, le Brésil et bien sûr la Chine, où selon les estimations, le marché pourrait croître de 20 % après un bond de 45 % en 2009. Selon Carlos Ghosn, président de Renault et de Nissan, l'industrie automobile devrait même établir un nouveau record en 2010 avec 70 millions de véhicules produits contre 57 millions seulement en 2009.

Nathalie Brafman
. Publié dans l'édition du Monde du 16 juillet

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