Les Ford au salon de l'auto
L'échec de la reprise de l’usine par HZ est complet, c'est maintenant évident pour tout le monde Mais officiellement les suppressions d’emplois ne sont pas à l’ordre du jour. Ford l’ex-propriétaire (qui reste un décideur dans un conseil d’administration) est dans une position inconfortable du fait de la mobilisation permanente pour la sauvegarde des emplois.
Cette mobilisation a contraint Ford à revenir dans la discussion. Les exigences sont que Ford « rachète » l’usine et la réintègre dans le plan de production européen. Le syndicat CGT-Ford, majoritaire, est le seul (sur les 6 du site) à garder le cap de la défense de tous les emplois s’appuyant sur l’expérience de la mobilisation depuis 2007 pour dire que les salariés peuvent changer la donne par la lutte. Il s'agit de refuser de sombrer dans la démoralisation et le fatalisme. C'est compliqué.
Il y a une véritable bataille d’opinion et d'influence dans un contexte difficile où Ford prépare le terrain à des réductions d’effectifs présentées comme inéluctables. Cela constitue une pression qui renforce l’ambiance de résignation dans l’usine. D’autant plus que 5 syndicats se positionnent pour la « négociation » des conditions de départ, d’éventuels plans de suppressions d’emplois entretenant ainsi la résignation.
L’équipe CGT-Ford ne lâche pas le morceau. C’est au moment où l’opinion basculait peu à peu vers l’idée qu’il n’y avait plus rien à faire qu’elle décide d’organiser, avec l'aide du Comité de Soutien, une manifestation au Salon de l’Automobile à Paris pour le 2 octobre. Une manière de changer l'actualité dans l'usine. Comme il y a deux ans, l’objectif est de toucher l’image de marque de Ford et ainsi d’exercer une pression qui pourrait pousser la multinationale à maintenir l’activité sur le site.
Il y a urgence et une course contre la montre est lancée. Les pouvoirs publics locaux sont sollicités et soutiennent la manifestation pour la défense des 10 000 emplois induits dans la région. Les syndicats d’entreprises, la population sont aussi sollicités à la fois pour aider au financement et pour s’inscrire dans le train spécial affrété pour l’occasion. Un train de 400 places comprenant symboliquement des salariés de Ford et leurs familles, des syndicalistes, des élus, des habitants pour défendre les emplois de tous.
La combativité des salariés est faible tant domine le sentiment d’impuissance devant l'importance de l'enjeu. Mais la sympathie pour la manifestation est importante, s’illustrant par un gros soutien financier de la grande majorité des collègues. Le soutien en dehors de l’usine est aussi très visible. Les 50 000 euros nécessaires à l’organisation de la manifestation ont été récoltés en 3 semaines (dons et prêts).
Nous savons que l'issue dépendra d'une mobilisation large de tous. En ce sens, le train spécial de l'emploi constitue un événement et représente un espoir pour influer sur la suite des événements.
Philippe Poutou