Diesel : urgence pour garantir sans conditions l'emploi

Publié le par NPA Auto Critique

L’état d’urgence pour la filière automobile diesel est enfin reconnu. Selon les estimations fournies par les constructeurs automobiles, elle rassemble en France 37500 salariés avec selon leurs prévisions la perte de 10000 à 15000 emplois dont 5500 menacés à court terme. Près de 300 établissements sont menacés, dont 6 « en crise avérée à traiter d'urgence » et une trentaine «très fragilisés ». Voir l’article publié par npa-auto-critique en janvier 2019. Et il ne s’agit que des chiffres chez les constructeurs et les principaux équipementiers, sans inclure tous les emplois induits autour des emplois directement menacés.

Lundi 11 mars au ministère des finances à Bercy, du « grand monde »  a été réuni :  deux anciens ministres de Sarkozy : Bruno Lemaire actuel ministre de l’économie et Luc Chatel ancien ministre de l’éducation nationale reconverti en chef de la "Plateforme automobile », le lobby patronal de toute la filière. Et 6 présidents de régions, des dirigeants de PSA ; Renault, Toyota et Michelin, le secrétaire général de la CGT...

Aucune ambiguïté : les responsables de cette situation scandaleusement niée depuis des années sont les constructeurs automobiles et les gouvernements, et en particulier les français. Alors que les dangers des émanations de particules fines des motorisations diesel sont depuis longtemps dénoncés par l’Organisation Mondiale de la Santé et de nombreuses ONG, la population a été incitée à acheter des véhicules diesel. Et les utilisateurs de véhicules diesel anciens, les moins chers à l’achat et à l’usage, en sont aujourd'hui les premières victimes.

Quelques mois après la révélation du scandale diesel Volkswagen qui a définitivement ébranlé la confiance envers le diesel partout dans le monde, le ministre omniscient de l’économie Macron osait déclarer en août 2016 devant les ouvriers de l’usine Bosch à Rodez que le moteur diesel était  "au cœur de la politique industrielle française" et de la "mobilité environnementale".

Oui la responsabilité de Macron et des constructeurs automobiles est totale car ils ont délibérément provoqué cet état d’urgence en ignorant les alertes grandissantes depuis des années. Et comble du scandale, ils essaient encore aujourd’hui de rentabiliser plus longtemps leurs anciens outils industriels en ayant recours au chantage à l’emploi. A la manière des industries du tabac, de l’amiante, et de Monsanto, ils mobilisent enquêtes biaisées pour tenter de démentir un consensus scientifique. Et force est de reconnaître qu’ils peuvent connaître un écho parmi ceux qui voient dans la dénonciation du diesel un complot contre l’emploi et l’industrie.

Refuser ce chantage, c’est exiger que la garantie de l’emploi pour tous soit un préalable non négociable à la reconversion inéluctable de la filière diesel. Et ne comptons ni sur les constructeurs automobiles ni sur le gouvernement pour « offrir » naturellement cette garantie. La garantie de l’emploi ne pourra être obtenu que par une mobilisation d’ensemble. Aux provocateurs pollueurs de payer !

Le compte rendu diffusé par l'AFP

Le gouvernement veut notamment élaborer "un plan concerté" pour accompagner la chute continue des ventes de voitures au gazole. La part de ces motorisations a chuté de moitié en cinq ans, mettant au défi de nombreuses entreprises et menaçant des milliers d'emplois dans le pays.

"Il ne faut pas nier que la baisse du diesel en France a des conséquences sur les investissements dans nos territoires" et sur l'emploi en France, a affirmé Luc Chatel, président de la Plateforme automobile, qui représente la filière, à la sortie de la réunion.

Selon lui, "la filière automobile est face à une restructuration qu'elle n'a jamais connue dans son histoire", il est donc "très important que les industriels soient réunis avec l'Etat, avec les collectivités territoriales, avec les représentants de personnels pour harmoniser leurs politiques et faire en sorte qu'on prenne les bons virages et qu'on amortisse le choc quand il y a des difficultés".

- "Mobilisation générale" -

En 2013, 67% des voitures immatriculées en France étaient équipées de moteurs diesel, contre seulement 35% ces derniers mois. La baisse a atteint les mêmes proportions à l'échelle européenne.

Ces motorisations, dont les constructeurs français s'étaient fait une spécialité, subissent le contrecoup du "dieselgate", l'affaire des moteurs truqués de Volkswagen révélée en 2015. Elles sont aussi de plus en plus épinglées pour leurs émissions de particules et d'oxydes d'azote. De nombreuses villes, notamment en Allemagne, ont commencé à restreindre l'accès à ces véhicules.

Le ministre de l'Economie Bruno Le Maire a appelé à "la mobilisation générale pour accompagner les évolutions de la filière automobile", dans un communiqué diffusé après la réunion.

Une cartographie "précise des sites industriels menacés par l'évolution des motorisations" va voir le jour, tout comme une étude scientifique sur les émissions de dioxyde de carbone et d'oxyde d'azote "en conditions réelles des véhicules récents tant diesel qu'essence", selon le document.

Bercy propose également, en accord avec certains syndicats, de réviser la classification des véhicules pour rendre éligibles à la vignette Crit'Air 1 les véhicules diesel qui en respectent les critères, alors qu'ils étaient jusqu'ici exclus d'office. Les véhicules diesel les mieux classés (normes Euro 5 et 6) reçoivent aujourd'hui une vignette de catégorie 2.

Cette position semble faire consensus au sein du gouvernement. Avec Bercy, "nous sommes d'accord sur une chose qu'on pourrait appeler la neutralité technologique, c'est-à-dire que nous, on regarde l'application des normes et on ne regarde pas si c'est telle technologie ou telle autre", a assuré le ministre de l'Environnement François de Rugy sur BFMTV/RMC.

- Rupture technologique -

"Personne autour de la table ne conteste ou ne freine sur la transition écologique, sur l'évolution climatique", a expliqué pour sa part le président des Hauts-de-France, Xavier Bertrand. "La seule chose c'est: est-ce qu'on décide d'aller plus vite que la musique et donc de mettre en péril des dizaines de milliers d'emplois qui sont encore dans la filière diesel, ou est ce qu'on marie les deux?"

De son côté, le président de Nouvelle-Aquitaine Alain Rousset a évoqué "un effort considérable à faire de formation de long terme". Le discours des présidents de régions "a été de dire: attention, ne ratons pas une rupture technologique avec l'hydrogène et l'électrique. Ne faisons pas comme entre le minitel et l'ordinateur".

Cette réunion a permis de faire "un gros état des lieux. Les chiffres ont été posés sur la table, tout le monde est mis devant ses responsabilités", a jugé Gabriel Artero de la CFE-CGC. "On court après le temps pour la filière automobile en général et surtout pour les sites dépendants du diesel", comme l'usine Bosch de Rodez.

Une nouvelle réunion du même type "sera organisée dans les trois mois", a précisé Bercy.

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